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Le « Deal du siècle » brouille Riyad, Le Caire et Amman

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Manifestation des Palestiniens pour la levée des sanctions contre la bande de Gaza, à Ramallah, en Cisjordanie, le 12 juin 2018. ©AP

En désaccord avec les Saoudiens, l'Égypte insiste sur le fait que Qods-Est soit la capitale palestinienne, précisant que tout plan économique pour Gaza ne saurait se substituer à un plan diplomatique approuvé par les Palestiniens.

Le journal israélien Haaretz indique dans son édition du 23 juin que ce dont l’Autorité autonome palestinienne et le secrétaire général de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), M. Saeb Erakat, ont peur, est que l'un des objectifs du plan américain dit « Deal du siècle » soit de renverser l’actuel chef de l’Autorité, Mahmoud Abbas.

Un haut responsable de l'Autorité palestinienne (AP) a déclaré à Haaretz que l'Autorité palestinienne craint une « conspiration israélo-américano- saoudo- égyptienne » dont le but est de « séparer Gaza de la Cisjordanie, fournir une solution économique toute prête et esquiver les négociations diplomatiques sur l'avenir de la Palestine ».

Et cette peur est apparemment justifiée. Les rapports des médias égyptiens qui s'appuient sur les déclarations des diplomates occidentaux stipulent que le plan américain vise à établir une zone de libre-échange entre la bande de Gaza et El-Arish au Sinaï où cinq grands projets industriels devraient voir le jour. À la demande israélienne, ces projets seront établis en Égypte, qui se chargera de superviser les opérations et le passage des travailleurs de Gaza au Sinaï. Par la suite, un port commun égypto-palestinien et une station d’énergie solaire seront construits, et si tout se passe comme prévu, un aéroport sera aussi construit. Le gouvernement de Gaza restera sous le contrôle du Hamas, avec la pleine coordination de l'Égypte, qui a mené ces derniers mois d’intenses discussions avec le Hamas sur les procédures de contrôle aux postes frontaliers.

L'Égypte, qui a ouvert le passage de Rafah à la mi-mai à l’occasion du mois de ramadan, gardera les passages ouverts pendant encore deux mois jusqu'à l'Aïd al-Adha (fête du sacrifice), avec l'intention de la laisser ouverte indéfiniment.

C'est aussi un message clair à l'AP que si Mahmoud Abbas continue d'entraver la réconciliation entre le Hamas et le Fatah, Gaza sera séparée de la Cisjordanie et le processus d'unification des deux parties de la Palestine bouclé.

Il semble que le message égyptien ait été entendu, et selon un haut responsable du Fatah en Cisjordanie, Yahya Rabah, l'Autorité palestinienne commencera à payer les salaires suspendus aux fonctionnaires gazaouis. En outre, toujours en coordination avec l'Égypte, les pourparlers de réconciliation entre le Fatah et le Hamas reprendront dans le but de relancer le gouvernement d'union nationale à Gaza.

Cependant, Le Caire, qui est particulièrement inquiet des développements à Gaza, n'accepte pas pleinement l'initiative américaine. Jeudi, après une rencontre entre le président égyptien Abel-Fattah al-Sissi, le ministre des Affaires étrangères Sameh Shoukry et le chef du renseignement Abbas Kamel, responsable du dossier palestinien, le porte-parole de la présidence Bassam Radi a annoncé: « L'Égypte soutient tous les efforts et les initiatives pour arriver à un accord global, fondé sur les résolutions internationales prises dans le passé et sur le principe de deux États pour deux peuples dans les frontières de 1967, avec Qods-Est comme capitale de la Palestine. »

Cette position montre clairement que l'Égypte ne soutient pas l'idée des Saoudiens selon laquelle Abu Dis est envisagée comme capitale palestinienne, et que tout plan économique pour Gaza ne saurait se substituer à un plan diplomatique approuvé par les Palestiniens.

Sur cette photo prise le jeudi 21 juin 2018, le président égyptien Abdel-Fattah al-Sissi (D) rencontre le gendre et conseiller principal du président américain, Jared Kushner, et l'envoyé du Proche-Orient, Jason Greenblatt, au Caire, en Égypte. ©MENA/AP

Le roi Abdullah de Jordanie s'inquiète principalement de l'intention de l’Arabie saoudite de priver son royaume du parrainage des lieux saints à Qods. À court terme, il ne s'oppose pas au développement économique indépendant de Gaza, mais il soutient la traditionnelle position arabe selon laquelle Gaza et la Cisjordanie ne sont pas des entités séparables.

Selon des sources arabes, le roi Salmane d’Arabie et le prince héritier Mohammed ben Salmane, semblent être en désaccord sur cette question. Alors que le fils est un fervent partisan du Deal du siècle et de la séparation de Gaza de la Cisjordanie, son père se soucie des critiques qui l’attendent si jamais il renonce aux principes de l'initiative de paix saoudienne de 2002 en divisant le "problème palestinien" en deux parties et renonçant à ce que Qods-Est soit la capitale de la Palestine.

Mais ce n'est pas seulement le « Deal du siècle » qui est source de dispute entre les dirigeants arabes. L’appel du président Donald Trump à l'Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis et au Qatar de participer au financement de nouveaux projets à Gaza aurait rencontré une forte opposition de la part de l'Arabie et des EAU.

Les deux pays ont clairement indiqué aux émissaires américains que l'implication du Qatar signifierait que « l'Iran entrera à Gaza par la porte de derrière » et qu'ils pourraient gérer eux-mêmes le financement - estimé à un milliard de dollars - si l'Égypte et Israël sont d'accord.

Les querelles politiques au sein du régime d’Israël sont susceptibles de saborder le processus de règlement du conflit israélo-palestinien de sorte qu’une confrontation militaire avec Gaza n’est pas exclue, tout comme une opposition entre Tel-Aviv et Washington.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV